En juin, 7 artistes internationaux s’associaient à Parley for The Oceans (l’association de Cyrill Gutsch qui milite pour une mode responsable et écologique) en créant une oeuvre engagée pour lutter contre la pollution plastique.
Célébrés dans le monde entier, les artistes Doug Aitken, Jenny Holzer, Ed Ruscha, Julian Schnabel, Pipilotti Rist, Walton Ford et Rosemarie Trockel représentent la scène contemporaine internationale. Pour cette collaboration, ils ont chacun customisé un modèle de sacs faits à partir du Parley Ocean Plastic ®, un plastique recyclé, récolté au fond des océans.
Source : Numero

Pour cette collaboration, chaque sac est ainsi fabriqué à partir de bouteilles récupérées au large d’îles abandonnées et des lignes de côtes. Source : Deezen

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Pour lui, l’évolution des mentalités passe par la mobilisation des milieux créatifs, véritables vecteurs de changement sociétaux, inspirants et impactants. L’art servirait selon lui bien mieux la cause écologique qu’un long discours explicatif ou de culpabilisation.

Cyrill Gutsch par Sacha Maric
“À chaque projet que nous réalisons, nous cherchons à convaincre en privilégiant des arguments positifs et en associant des artistes à notre démarche, pour créer de la beauté et pour inspirer notre public, plutôt que d’accabler les gens,” déclarait Cyrill Gutsch à Numéro Magazine, l’an dernier.
Source : Numero
Il est intéressant de noter que si cette vision de l’engagement de l’art pour l’écologie est d’actualité (brulante en ce moment), elle n’est en revanche pas nouvelle. On en retrouve ainsi un bel exemple en France, il y a trente ans de cela.
En 1989, une époque où peu d’artistes s’intéressaient à la question environnementale, peu de personnes connaissant d’ailleurs l’existence du « trou dans la couche d’ozone » et où les « collectifs » d’artistes étaient rares, quatre français issus de l’école des beaux-arts de Grenoble, firent figures de précurseurs en organisant un projet collectif singulier intitulé: « Ozone ».
La nature (et la relation de l’homme avec celle-ci) était le thème central de cette exposition constituée d’éléments divers entre lesquels le visiteur pouvait déambuler. Les 4 artistes ont apporté chacun leur contribution particulière.
Source : Expositions modernes

On pouvait ainsi contempler une peinture de dinosaures ultra réaliste réalisée par Bernard Joisten sur 2 écrans de projections, ramenant le spectateur à la vision d’une époque (et d’une nature) « pré-technologie ».
Des informations sur les questions environnementales (comme une image du dernier arbre de Tchernobyl ou des souvenirs de grands activistes écologistes) étaient laissées à disposition des visiteurs par l’artiste Dominique Gonzalez-Foerster sous formes de cartes, de journaux à consulter sur place. Source : Numero

Collection of the Fonds régional d’art contemporain Corse (destroyed). Photo: Le Magasin
Philippe Parreno choisit lui d’illustrer les relations de l’homme moderne avec la nature via la présentation d’accessoires liés à des sports symbolisant l’exploration de ce lien, comme la planche à voile, le parapente ou la plongée.
Enfin, l’artiste Pierre Joseph présenta des images de la nature numérisées et modélisées, présentées sur de grandes diapositives en plastique, explorant ici la relation entre nature et technologies numériques : on pouvait ainsi par exemple voir une chute d’eau reconstituée par ordinateur.
Source : Numero

Dominique Gonzalez-Foerster, Bernard Joisten, Pierre Joseph and Philippe Parreno, “Vidéo Ozone” (1989).
Ecosystème composé d’éléments différents et complémentaires, cette exposition détonnait surtout par le message qu’elle portait, à une époque où l’art était beaucoup moins engagé qu’aujourd’hui, surtout sur un sujet comme celui de la relation de l’homme à l’environnement.
Si l’oeuvre, (qui faisait partie de la collection du FRAC Corse) fut détruite lors d’un incendie en 2001 et n’est plus visible aujourd’hui, elle démontrait une volonté forte (et finalement pas si récente) de questionner les enjeux de la création artistique et de son engagement, nécessaire pour faire évoluer les mentalités.
Source : Numero

Dominique Gonzalez-Foerster, Bernard Joisten, Pierre Joseph and Philippe Parreno, “Sac Ozone” (1989).
On observe alors, à trente ans d’écart, un parallèle (pas si étrange) entre ces artistes qui considéraient l’art comme vecteur de changement sociétal et véritable outil de sensibilisation à la cause écologique.
Alors que ce 29 juillet 2019, l’humanité a atteint le jour où nous avons déjà consommé plus de ressources naturelles que la terre n’est en capacité d’en produire au cours d’une année (un jour qui chaque année arrive de plus en plus tôt), on ne peut s’empêcher de penser nous n’avons pas assez entendu (ou écouté) les signaux d’alerte tirés par ces artistes sur la nécessité de protéger notre environnement.
